Il y avait déjà des raisons de croire, non sans frayeur, que Francis Ducreux, le « Père » des tours cyclistes en Afrique noire aurait rejoint ses ancêtres gaulois en emportant dans ses valises le présent et le futur du tour cycliste international du Togo. Avant et après sa mort, le tour a connu des moments de vacillement et de doute. La bonne nouvelle depuis peu, c’est que des compétences locales, dans un sursaut de chauvinisme, au sens positif du terme, se sont mobilisées pour démentir les pronostics pessimistes. Le fruit de leur mobilisation est le retour du tour cycliste international du Togo. Le rendez-vous est pris du 3 au 9 juin prochain. Les défis sont de divers ordres mais tous tant qu’ils sont, ils annoncent de nouveaux horizons pour ce rendez-vous au Togo des férus de la petite reine.
« Le Togo enfin », entend-on murmurer dans les couloirs du cyclisme en Afrique subsaharienne. Cette formule se justifie par le fait que, avant et surtout après le décès de Francis Ducreux, beaucoup de pays, à l’exception du Togo, avaient déjà réussi le pari d’avancer sans le bourgeois gentilhomme. Le Bénin, a-t-on appris, a même réussi le pari de faire inscrire son tour au calendrier international 2.2 de l’Union cycliste internationale (UCI). Mieux, sans Ducreux, le Bénin est passé en mode professionnel alors qu’il était resté amateur durant toutes les années Ducreux. En rallumant le flambeau du tour, les organisateurs savent, à peu de choses près, ce que les acteurs du secteur attendent d’eux.
Des ambitions
Sur le moment, c’est déjà une bataille gagnée que de remettre à flots le navire du tour cycliste international du Togo. Les années de silence ne profitaient à personne, surtout que dans la sous-région, les autres pays avaient continué à travailler et à progresser. L’autre bataille à gagner, les organisateurs sont très attendus à ce niveau, c’est de réussir cette édition post-Ducreux. Ils en sont conscients et on peut dire que leurs ambitions sont à la juste mesure de ces attentes.
« Reprendre le tour après 28 éditions et cinq ans d’interruption est un défi majeur, mais c’est une pression positive qui nous pousse à nous surpasser », a confié le promoteur du tour, Samuel Mmaju. Cet état d’esprit est positif et mérite d’être salué à juste titre. Dans ce sens, une première ambition des organisateurs est de se servir de ce tour pour mettre en vitrine le Togo et ses richesses culturelles et touristiques. Des conventions sont ainsi scellées avec des tours operators pour offrir aux visiteurs des forfaits touristiques spéciaux. Cela leur permet de prolonger éventuellement leur séjour au-delà des dates du tour et de découvrir le charme de la faune et de la flore des régions du Togo, des Savanes, des Plateaux et de la côte notamment.
En relais, le tour est attendu pour générer des retombées au plan économique à différentes échelles de la vie économique. Que ce soit dans le tourisme, dans l’emploi, dans l’hôtellerie et dans la restauration, le tour cycliste a le mérite de créer les conditions favorables à des flux économiques ; avant, pendant et après le tour, des citoyens peuvent trouver du travail, à temps partiel ou plein, à durée déterminée et, possiblement, à durée indéterminée.
Développement du cyclisme
Au surplus, nos sources renseignent que les organisateurs aspirent, à partir de ce tour de relance, de mettre en place un dispositif pérenne destiné à assurer le développement du cyclisme au Togo. Une première mesure concerne les catégories de cyclistes attendus sur ledit tour. Elles sont trois en effet : élite, espoir et amateur. Si la hiérarchie apparaît clairement, il faut souligner que ce qui est attrayant dans les prévisions des organisateurs, c’est la possibilité pour des amateurs de concourir contre des professionnels.
« Les différentes catégories de participants sont mises en place pour assurer une compétition équitable et permettre aux cyclistes de différents niveaux de compétence et d’âge de participer à la course. Cela favorise également le développement du cyclisme en offrant aux cyclistes amateurs la possibilité de concourir aux côtés de coureurs élite et espoir, ce qui peut être une expérience précieuse pour leur progression dans le sport », peut-on lire dans le document de présentation du tour. En vérité, l’intérêt d’une telle proximité ne doit pas être évoqué en termes de possibilité ; il s’agit plutôt d’une évidence. Car en fait, le cycliste amateur qui est en lice avec des professionnels et des coureurs plus expérimentés découvrent, à son corps défendant, techniques et tactiques pour devenir ou être un coureur redouté.
Une seconde mesure concerne la propagande médiatique qui est prévue autour du tour. Si tant est que l’un des défis à relever est de faire de ce tour un événement populaire, il faut aussi et surtout que les populations qui ne peuvent pas voir passer la caravane du tour devant leurs portes puissent savoir ce qui se passe, au quotidien. Les médias, en général, la télévision en particulier, est affectée à cette mission. Pour la circonstance, les organisateurs annoncent des retransmissions en direct, des interviews avec des cyclistes et des résumés quotidiens. En dehors des chaînes nationales, Canal+ sera mise à contribution. C’est excitant.
Tout n’est pas de rallumer le flambeau. Le plus dur est devant. Il s’agit de s’inscrire dans la durée et surtout de faire franchir des paliers au cyclisme togolais. Très rapidement, il faut que le tour cycliste du Togo trouve une place dans le calendrier international 2.2 tout en envisageant la professionnalisation. La fédération et les promoteurs du tour ont du pain sur la planche : faire briller à nouveau le cyclisme togolais. Ce n’est pas impossible.
Kodjo AVULETEY