Depuis 2018, le Wado Ryu, un des styles du Karaté est implanté à Lomé au Togo grâce au Libanais Nachaat Soueydan. Avec son club Coloris Wado Ryu, il envisage conquérir tout le territoire pour donner de la visibilité au Karaté dont les Togolais connaissent plus le Shotokan Ryu.
En juillet dernier, le Karaté a fait pour la première fois son apparition aux JO Tokyo 2020 différés en 2021 en raison de la crise sanitaire mondiale. Le Karaté, cette discipline d’art martial japonais se pratique depuis plus d’un siècle de par le monde. Comparativement à d’autres disciplines d’arts martiaux, il existe plusieurs styles de Karaté.
Le Karaté : un art martial à plusieurs styles
Plusieurs écoles ou styles différents se sont créés depuis le 20e siècle. Mais la World Karate Federation, l’instance mondiale, reconnait quatre styles : le Shotokan Ryu, le Wado Ryu, le Shito Ryu ou encore le Goju Ryu. Ces styles varient tous les uns des autres, dans bien des domaines : frappes, positions de combat, utilisation d’armes, applications martiales…
Le Shotokan Ryu issu du Shorin Ryu d’Okinawa est le style de Karaté japonais le plus populaire et le plus pratiqué dans le monde. Déjà en 1922, ce style a été présenté à l’occasion d’une démonstration nationale au Japon. Yoshikata est à l’origine de ce style qui est considéré comme l’un des plus puissants avec des coups de poing directs, des coups de pieds bas et les katas longs. A côté, il y a le Goju Ryu fondé en 1926 par Chojun Miyagi est resté sur le style traditionnel du Karaté avec les bases ancestrales d’Okinawa. Il s’est caractérisé par des positions naturelles, puis des modes de frappes et des déplacements souvent circulaires, visant les points vitaux, les coups de pieds bas. Le Wado Ryu qui signifie « l’école de la voie de la paix » est de Hironori Ohtsuka, fondateur en 1939. Il est issu d’une modification du Shotokan original en développant un style moins rigide visant à éviter les coups de l’adversaire plutôt qu’à les bloquer. Au cours de 1939, un second style a vu le jour : le Shito Ryu avec Kenwa Mabuni. Ce style possède officiellement 60 katas. En plus de cela, le créateur dudit style a rajouté le Naha-te et le Shuri-te, des techniques souples de mains comme des blocages circulaires et des attaques de poings à courte distance. Ce style utilise des coups de poing souples et les coups de pieds visant les parties médianes du corps.
Wado Ryu, la passerelle
Les amoureux d’arts martiaux ont découvert pour la première fois la prestation d’un club togolais de Wado Ryu à l’occasion de la première édition de la nuit des arts martiaux organisée par l’Association des Journalistes Sportifs du Togo (AJST) en novembre 2018. A la tête d’une dizaine de pratiquants du club dénommé Coloris Wado Ryu s’est trouvé Nachaat Soueydan qui a expliqué comment il est arrivé à la pratique de ce style de Karaté. « Après la Boxe et le Kickboxing au Liban, je suis arrivé au Shotokan en 1991 en Guinée. Je l’ai pratiqué jusqu’en 1995 où parti à Abidjan en Côte d’Ivoire j’ai découvert le dojo Aimé Césaire Wado Ryu. Depuis, je n’ai plus quitté le Wado Ryu et c’est resté en moi », a-t-il raconté. Son choix pour ce style fut motivé par les esquives, les combats rapprochés et le côté self-defense enseignés. Aussi, il avoue être séduit par l’harmonie et la voix de la maîtrise de soi procure l’art puis le style de vie à tout pratiquant jeune ou vieux. Depuis son arrivée à Lomé en 2005, Nachaat Soueydan, le précurseur de ce style de Karaté au Togo a réussi à mettre en place un club. « J’ai continué ma perfection personnelle avec les stages et examens de passage de grade en France et bien entendu en Côte d’Ivoire. L’amour pour ce sport ne jamais quitté et j’ai décidé d’aider les jeunes qui sont motivés pour les arts martiaux. Depuis avril 2018, le dojo Coloris Wado Ryu est fondé ». Membre de la Fédération Togolaise de Karaté (FTK), Coloris est le seul club de Wado Ryu à faire partie de la cinquantaine de clubs de Shotokan que compte cette instance nationale créée en 1992 des suites de la dislocation de la Fédération Togolaise des Arts Martiaux (FETAM).
Un style de Karaté en quête de visibilité
Coloris Wado Ryu est à ce jour le seul club de cette école au Togo. A côté des clubs de Shotokan togolais, Nachaat Soueydan se sent à l’aise pas qu’il a le seul club au Togo mais parce que « avec les autres frères nous travaillons ensemble et j’espère que d’autres pratiquants de Karaté vont aimer le style de Wado Ryu pour installer des clubs et agrandir cette belle discipline afin de la faire connaître à tous ». Cette cohabitation n’est pas fortuite puisque les activités du Wado Ryu et du Shotohan sont similaires. « Tout comme au Shotokan, nous portons le karateji ou le takaido japonais pour le respect de la tradition. Les ceintures que nous portons sont la Blanche, le jaune, l’orange, le vert, le bleu, le marron et le noir tout comme au Shotokan et les examens de passage de grade de nos jours sont à 90% similaires. Nous avons les mêmes principes de combats et démonstration, kumité individuel et par équipe ; kata individuel et par équipe », a-t-il précisé. Avec la dizaine de pratiquants dont il dispose à son dojo Coloris avant l’apparition de la pandémie à Coronavirus, Nachaat Soueydan inculque à cette jeunesse, le contrôle de soi, l’amour autour de soi et l’amour des autres, les valeurs que prône car le Wado Ryu « c’est plus un art qu’un style de combat ».
Dans un monde où le Karaté Shotokan s’est fait une place, le responsable du club Coloris Wado Ryu reconnait qu’il faut abattre beaucoup de travail pour se mettre au soleil. Nachaat Soueydan ne se presse pas. Il estime qu’avec le temps le Karaté Wado Ryu va se frayer un chemin dans le landerneau des arts martiaux togolais. « Avec des compétitions bien organisées, du beau spectacle et surtout une bonne communication pour faire comprendre le Wado Ryu qui est un sport qui pratique sans violence, nous allons nous donner de la visibilité », confie-t-il.
La pratique du Wado Ryu n’a pas de limite d’âge. Dès 5 ans un enfant peut commencer le Karaté et vieillir avec. L’on devient adepte de la discipline en ayant la confiance et la maîtrise de soi, la souplesse et la condition physique. Avec un entraînement régulier tous les deux jours, un pratiquant peut obtenir la ceinture noire en prêt de cinq ans de pratique et devenir Sensei (un Maître). Déplorant l’intérêt de la jeunesse aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, Nachaat Soueydan sollicite l’appui des parents pour que le sport occupe également une part importante dans la vie de leurs enfants. « Je vois beaucoup de nos jeunes aujourd’hui bloqués par le virtuel des téléphones, tablettes et télévision. Je ne suis pas rassuré avec cette façon qui nous est imposée par la technologie. Il ne s’agit pas de retirer les enfants de la modernité mais plutôt leur donner la possibilité de pratiquer des arts martiaux qui canalisent les forces et énergies puis rendent meilleurs », rappelle-t-il car il n’y a rien en dehors du sport qui puisse remplacer la santé. « Je dis souvent que le sport remplace les médicaments vendus par les pharmaciens. Si vous êtes pratiquant et que vous exercez régulièrement notre sport, vous avez déjà combattu le premier facteur de mortalité au monde qui est le stress. Par la souplesse, vous garderez votre corps beau et jeune et comme c’est un sport très complet, tout le corps participe et donc vous aurez une belle silhouette », recommande-t-il. Ainsi, conseille-t-il aux parents de « ne pas hésiter à inscrire les enfants aux arts martiaux quelques soit le style. Les styles chinois et coréen sont de très bon guide pour nos jeunes ».
La Covid-19 : un frein dans l’essor de la discipline
En trois ans d’existence, Coloris Wado Ryu club n’aura exercé réellement que pendant un an et demi. La crise sanitaire oblige. Depuis mars 2020, les activités sportives ont été suspendues par le gouvernement togolais jusqu’à nouvel ordre. « Nous essayons de participer à l’évolution du Karaté au Togo. On entrevoyait l’organisation de deux compétitions au cours de l’année 2020 quand subitement la pandémie à coronavirus est venue mettre tout sens dessus sens dessous », a-t-il regretté. Début d’année 2021, la reprise progressive des activités sportives n’a été que de courte durée. Pendant ce laps de temps, à Coloris Wado Ryu club, les entrainements avaient repris uniquement avec les pratiquants majeurs. « Nous avons arrêté comme tous les autres clubs sur décision gouvernementale pendant presque un an. Avec le protocole sanitaire édicté, nous avons repris uniquement avec les pratiquants majeurs au nombre de six 6 sur une surface de 110m². Les exercices étaient basés sur des séances sans contact avec des cache nez obligatoires. Ce qui nous a beaucoup fatigué mais qui en même temps nous a aidé à avoir du souffle », s’est-il réjoui jusqu’à ce que la nouvelle décision de suspension ne tombe. A présent que la reprise des activités sportives est subordonnée à la vaccination contre la Covid-19 pour préserver l’immunité collective, Nachaat Soueydan compte retrouver très prochainement ses élèves pour reprendre le travail au dojan.